Steve Haldeman

Le plaisir anal masculin

Le plaisir anal masculin

Vous pouvez lire l’article, ou le découvrir en version audio avec le lecteur ci-dessous. Il est également disponible en vidéo sur ma chaîne YouTube (lien dans le menu), et prochainement sur toutes les plates-formes de Podcast.

Suite à l’article sur l’éducation sexuelle, m’est venu l’envie de m’attaquer à ce tabou tenace et aux errements qu’il engendre. Depuis des années, je me suis aperçu que le plaisir anal masculin est un sujet qui est très largement occulté, et que cette facette cachée de la sexualité masculine donne lieu à des réflexions souvent fausses, faute d’une communication suffisante.

Les préjugés physiologiques

Le plaisir anal, que ce soit chez les femmes comme chez les hommes, pâtit toujours de préjugés terre-à-terre qui ont la vie dure :

 

– Ça fait mal !

 

Alors non, ça ne fait pas mal. Du moins, ça ne fait pas mal si vous n’êtes pas brutal, et que, surtout, vous ou votre partenaire prenez votre temps. Les sphincters sont des muscles, et comme tous les autres, ils sont souples. Il faut simplement leur laisser le temps de s’échauffer. Ils sont d’autant plus souples qu’ils sont justement prévus pour s’ouvrir, même si ce n’est pas dans le sens qui nous intéresse. Et sauf à être gourmand, la plupart des choses que vous essayerez de faire entrer dans votre anus ne sont pas plus grosses que ce qui en sort naturellement.

 

– C’est sale !

 

Non, ce n’est pas sale. C’est votre corps, c’est tout. Et comme toutes les parties de votre corps, c’est un endroit qui se nettoie. En plus, la sodomie est une pratique qui peut se préparer, et il n’est pas forcément nécessaire de faire un lavement. Si vous êtes en bonne santé, et que vous n’avez pas de souci de transit, il n’y a aucune raison qu’il y ait d’accident.

 

– Ça pue !

 

C’est sûr que si vous venez de faire une overdose de choux-fleurs ou de légumes verts, il y a des chances que ce soit moins agréable. Après, je ne vais pas vous dire que c’est un endroit qui sent la rose, mais honnêtement, à moins de faire une fixation là-dessus ou d’avoir une hygiène déplorable, ça ne gêne pas bien longtemps. À titre personnel, j’ai plus de mal avec l’haleine des fumeuses. Franchement, dans ce cas je préfère être face à leurs fesses !

 

– Ça rend incontinent !

 

C’est une légende urbaine, comme la masturbation qui rend sourd. Comme je l’ai dit, la plupart des gens qui pratiquent la sodomie ne font entrer là que des choses qui ne sont pas plus grosses que ce qui en sort. Et sauf passion déraisonnable, on se fait pénétrer là bien moins souvent qu’on ne va aux toilettes. Donc soit il faut arrêter de dire des bêtises, soit il faut arrêter de se soulager.

Les préjugés psychologiques

Ce sont surtout ceux-là qui provoquent le silence radio de la plupart des hommes sur le sujet. Et ce n’est pas étonnant, dans un monde où l’une des insultes les plus courantes est « Enculé ! »

 

– Les hommes qui aiment subir la pénétration anale sont des gays refoulés.

 

Celui-là, c’est celui que je lis le plus souvent. Pourtant, avec un peu de réflexion, on s’aperçoit qu’il n’y a aucune relation de cause à effet. Un gay, c’est un homme qui est attiré sexuellement par les hommes. Et encore, c’est une classification réductrice. De la même façon qu’il y a des couples hétéros qui sont asexuels, j’imagine que certains hommes peuvent être attirés par d’autres hommes, sans pour autant apprécier la sexualité qui va avec. Mais pour simplifier, je vais supposer que la plupart des gays sont ouverts à la sodomie. Pour autant, ce n’est pas réciproque. Ce n’est pas parce qu’un homme se rend compte que la sodomie lui fait du bien qu’il va en devenir gay. Il n’y a pas de nerf qui va de l’anus au cerveau, et qui induit l’homosexualité.
Par ailleurs, un homme peut parfaitement aimer se faire sodomiser par une femme, et pas par un homme.

 

– Les hommes qui aiment être pénétrés sont des soumis en puissance.

 

Là encore, ça n’a rien à voir. Ce n’est pas parce que la pratique de la pénétration anale suppose d’accepter d’être pénétré, que ça fait de celui qui se laisse faire un soumis. Sinon, toutes les femmes qui aiment être pénétrées, et qui se laissent faire pour cela, sont soumises. De plus, être pénétré ne signifie pas forcément être passif, même si ça peut paraître plus logique, compte tenu du fait que la sodomie nécessite un peu de relâchement.

 

– Les hommes qui aiment la pénétration anale aiment la sodomie.

 

La sodomie, c’est le fait de pénétrer l’anus de son ou sa partenaire. C’est quelque chose qu’on fait donc à deux.
Or un homme peut aimer se masturber seul l’anus, avec ses doigts, des objets ou des sextoys, sans pour autant avoir envie que qui que ce soit d’autre ne le fasse à sa place. Il peut aimer insérer quelque chose, puis juste sentir que c’est là, sans que ça bouge. Il peut aimer que ça vibre, ou pas. Il peut aimer les va-et-vient, ou pas. Il peut aimer ce qu’il veut, comme il veut et quand il veut. Et ceux qui croient qu’ils peuvent en tirer des conclusions hâtives par manque d’imagination se trompent.

 

– Les hommes qui aiment la pénétration anale ne sont pas virils.

 

Ça, c’est probablement une idée qui vient de l’omniprésence dans les médias des figures homosexuelles extraverties. Quand j’étais enfant, la représentation classique du gay, qu’on n’appelait pas gay d’ailleurs, mais pédé, c’était un personnage outrancier. On se moquait d’eux. Le terme pédé, qui vient d’ailleurs du mot pédéraste et qui signifie pédophile, était d’ailleurs une insulte courante. Les homosexuels étaient donc, dans l’imaginaire populaire, des caricatures d’homme maniérés ou travestis. Je pense que les moins jeunes d’entre nous se souviennent du film La cage aux folles.
L’imaginaire populaire en a été longtemps affecté, au point de croire qu’un homosexuel manque le plus souvent de virilité. Et comme on associe encore aujourd’hui plaisir anal masculin et homosexualité, les raccourcis rapides ont donné : plaisir anal masculin = pas de virilité.
Mais là encore, existe-t-il un nerf qui irait de l’anus au cerveau, et qui enverrait un signal qui donne envie aux hommes de porter une robe quand quelque chose entre dans leur anus ?

Alors que peut-on déduire des hommes qui sont ouverts au plaisir anal ?

Pas grand-chose en fait. Les hommes sont tous différents, et les motivations des uns et des autres sont variables. Il y a de grandes tendances bien sûr, mais il ne sert à rien de vouloir mettre des gens dans des cases.
Je dirais qu’un homme qui aime c’est simplement quelqu’un qui a eu assez de curiosité et d’ouverture d’esprit pour accepter le fait que cette zone fasse partie des nombreuses zones érogènes de son corps. S’il a envie d’en profiter, grand bien lui en fasse ! Et s’il assume, c’est qu’il est plus sage que la plupart des autres, qui ne veulent pas en entendre parler, parce qu’ils ont peur de ce qu’on pourrait penser d’eux.

La spécificité du plaisir anal masculin.

Le plaisir anal est différent chez les hommes et chez les femmes. Aussi, je vais faire un comparatif rapide, qui peut se révéler utile pour la compréhension de ce que peut apporter le plaisir anal chez l’homme.

 

Chez les femmes, il dépend avant tout de la personne, de son corps, mais on peut dégager des grandes tendances, qui encore une fois, ne doivent pas réduire toutes les femmes à ce que je vais écrire.
Pour simplifier, je dirais que la proximité du vagin permet de stimuler celui-ci, et que la sodomie peut exciter par son côté transgressif, ainsi que parce que c’est agréable de s’abandonner à quelque chose qui excite son ou sa partenaire. Cela dit, ça peut être tout un tas d’autres choses, spécifiques à chaque personne. Comme d’habitude, il faut éviter de coller des étiquettes aux gens, même si c’est rassurant de les catégoriser. Coller une étiquette à quelqu’un, c’est quelque chose que l’on fait naturellement, en essayant de faire correspondre un comportement que l’on a constaté, à quelque chose qu’on connaît déjà ou qu’on croit avoir compris intuitivement. Mais le monde est bien plus grand et varié que la représentation plus ou moins étriquée que nous en avons.

 

Pour les hommes, il y a une spécificité biologique qui peut les prédisposer au plaisir anal, c’est la prostate.
Vous trouverez sur internet un grand nombre d’articles qui vous diront que c’est le point G de l’homme, ou le point P. Il y a aussi de très nombreux tutoriels qui vous expliqueront comment procéder au massage prostatique. En revanche, si vous voulez savoir pourquoi ça plaît, ce sera plus compliqué. De la même façon que les mécanismes du plaisir féminin sont encore très peu connus, c’est également le cas pour ce qui concerne certains aspects du plaisir masculin. Alors c’est parti pour un peu d’explications académiques.

La prostate, qu’est-ce que c’est ?

La prostate est une glande de l’appareil génital masculin, qui se trouve à la jonction des voies urinaires et spermatiques. Elle englobe l’endroit où les deux canaux se rejoignent. La prostate sert essentiellement à produire une partie du liquide séminal, l’un des constituants du sperme. Ce liquide a plusieurs fonctions, mais je ne vais pas entrer dans les détails. Si vous voulez en savoir plus, je vous ai indiqué en lien la page Wikipédia correspondante.


Pour information, les femmes ont un équivalent de la prostate, ce sont les glandes de Skenne.

Pourquoi la prostate favorise le plaisir ?

Je ne pourrai pas vous dire précisément quel est le processus neurologique en cause, car comme je vous l’ai dit, il est mal connu. En tous les cas, il n’est pas documenté auprès du grand public, et puis ce n’est pas le but ici.
En revanche, je peux vous dire ce que la stimulation prostatique procure comme sensation, et peu importe comment elle est réalisée, car Wikipédia résume très bien le phénomène dans son article consacré au massage de la prostate, et qui se réfère à plusieurs articles et interviews parus dans Doctissimo, Télérama et le journal Le Monde : « Cet orgasme serait différent de l’orgasme pénien, ressemblant à celui procuré chez la femme car « plus diffus, plus viscéral et profond, et sans éjaculation. » « 
Et c’est probablement ça qui plaît aux hommes qui s’y sont essayés, car le plaisir qui accompagne l’éjaculation est très bref, et il est suivi d’un néant sexuel que bien des écrivains ont déjà décrit.

Le massage prostatique est généralement décrit comme une stimulation de la prostate en passant par l’anus, qui est lui-même une zone érogène importante.
Je ne vais pas décrire la façon de s’y prendre, car comme je vous l’ai dit, il y a déjà mille et une méthodes disponibles un peu partout sur internet et ailleurs. Si cela vous intéresse, je suis sûr que vous allez trouver.
En revanche, il est possible qu’une autre pratique sexuelle soit utilisée pour stimuler à la fois la verge et la prostate, c’est l’insertion d’un objet dans le canal urinaire, via le méat, jusqu’à remonter à la prostate en question. C’est une technique qui fait partie des jeux médicaux, dans le BDSM notamment, et qui est pratiquée par certains couples de Maîtresse et soumis. Mais on touche là aux limites de ce que je connais. Il serait plus utile que les pratiquants puissent donner leur avis, via les commentaires.

Une femme qui pénètre un homme, un acte politique ?

Je désirais écrire cet article depuis un moment, parce que j’aime m’employer à casser les idées fausses et malsaines sur la sexualité. Il se trouve que lorsque je m’y suis mis, je venais de tomber sur un article de Yahoo intitulé Les hommes ont-ils honte de se faire pénétrer ? Il semblerait que oui.
L’article fait la promotion de la bande dessinée L’homme pénétré, que l’on doit à Zoé Redondo et Martin Py.
L’auteur de l’article déclare que Martin Py voit dans la pénétration anale (sous-entendu des hommes) un acte politique.
Même si je peux comprendre son point de vue, je ne suis pas d’accord avec lui. La pénétration anale des hommes, comme n’importe quelle autre pratique sexuelle, devrait avant tout être une question de plaisir. Et il me semble que l’on devrait bannir de ce champ toutes les autres raisons. Peu importe nos convictions, nos engagements, où les relations difficiles que l’on a pu avoir par le passé avec d’autres partenaires. La sexualité, il me semble que cela devrait être avant tout un moyen d’épanouissement personnel, et pas un terrain de confrontation.

 

Les liens

 

– Article wikipedia sur la prostate : https://fr.wikipedia.org/wiki/Prostate

– Article wikipedia sur le massage prostatique : https://fr.wikipedia.org/wiki/Massage_de_la_prostate#cite_note-doctissimo_Desvaux-8

– Lien vers l’article « Les hommes ont-ils honte de se faire pénétrer ? il semblerait que oui. » : https://fr.style.yahoo.com/penetration-anale-homme-femme-sexe-095300997.html

 

Notre histoire :

 

La série Maître et soumise, leur histoire est un double roman BDSM, raconté pour l’un du point de vue du maître, et pour l’autre du point de vue de la soumise. Elle se compose de 4 tomes dont 2 sont déjà parus :

 

Ma soumise, mon amour, Tome 1 (septembre 2022)
– version e-book : https://www.amazon.fr/dp/B0BDMWCYR6/
– version papier : https://www.amazon.fr/dp/2494242002/

 

Mon Maître, mon amour, Tome 1 (juin 2023)
– version e-book : https://www.amazon.fr/dp/B0C9H2GYK9/
– version papier : https://www.amazon.fr/dp/2494243009/

 

Ma soumise, mon amour, Tome 2 sortira en décembre 2023
Mon Maître, mon amour, Tome 2 sortira en juin 2024.

1 réflexion sur “Le plaisir anal masculin”

  1. Il y a quelques mois, en préparation de cet article, j’avais posté et partagé sur quelques groupes Facebook ainsi que sur Fetlife, une vidéo demandant des témoignages à propos de la stimulation de la prostate via le canal urinaire.
    J’ai eu pas mal de réponses, dont une, que son auteur m’a autorisé à reproduire anonymement. La voici :
    A votre question, mes propos traitaient de la pénétration urétrale avec une évocation de la sensibilisation de la prostate par voie anale. Pas vraiment de pénétration anale, ce qui est un sujet différent. Puisque, en faisant vite, le plaisir anal n’est pas justifié par l’excitation de la prostate mais par une satisfaction d’occupation, de remplisage (et d’évacuation), et le fait que l’anus est une zone fortement inervée. Chez l’homme comme chez la femme. L’érotisation fait le reste.
    Evidemment, lors de pénétrations anales, les ‘agitations’ de l’anus et du rectum stimulent -ou gênent – les organes voisins : la prostate chez l’homme, le vagin chez la femme et s’accompagnent d’un éventail des sensations variables, plus ou moins riches, d’autant que tout l’ensemble est lié dans la zone périnéale (1).

    Si je peux me permettre, voici quelques éléments qui me semblent importants.

    Dans le paragraphe « ça rend incontinent » !

    Ce n’est pas une légende urbaine mais l’idée détournée des effets des dilatations abusives car il y a erreur avec la phrase « les gens qui pratiquent la sodomie ne font entrer là que des choses qui ne sont pas plus grosses que ce qui en sort ». Il a été constaté que par évolution du désir / plaisir, la nature de l’objet ‘pénétrant’ ne cesse de varier et sa taille d’augmenter. On peut donc y faire entrer, peu à peu, des volumes bien plus extraordinaires que ce que l’on imagine. Parfois tellement plus importants que l’organisme ne peut plus les évacuer si les sphincters se referment sur eux. La chirurgie devient alors l’ultime solution.
    Donc, plus le diamètre de l’objet s’accroît plus les sphincters sont distendus, jusqu’au moment ou leur élasticité (et force de rétractation) est perdue (2). Conséquence d’autant plus rapide si les pénétrations par de forts diamètres se répètent fréquemment. Ce qui est déraisonnable, oui, mais malheureusement la déraison est fréquente. Alors, leur rôle de verrouillage efficace du rectum n’est plus et il n’est pas rare que des contractions musculaires de l’abdomen (forte toux ou fort éternuement, rire violent, …) entraîne l’évacuation involontaire de matière fécale, ce qui est bien une forme d’incontinence.
    Dans le paragraphe « Préjugés psychologiques ».
    Je crois sincèrement que l’explication mériterait un engagement sur les tabous que la société humaine a conditionné, il y a longtemps, au regard de la proximité voire la superposition des organes de reproduction et d’évacuation. Ne sachant dissocier les premiers des seconds, toute la sexualité en est devenue ‘sale’, indécente. C’est un travail colossal que de briser ces idées là, surtout quand les religions en ont fait leur ‘cheval de bataille’. Parallèlement, il demeure un fort sentiment d’humiliation – imposée et/ou subie – dans de nombreux actes de pénétration anale où il est intentionnellement pratiqué dans cet état d’esprit.
    Si je peux me permette une autre petite remarque, la pédérastie n’est pas de la pédophilie telle que nous la concevons aujourd’hui, c’était dans l’époque grecque un acte social – avec ses déviances mais sur lequel notre jugement n’aura de toute façon plus aucun effet – faisant que l’enfant/adolescent entrait dans l’âge adulte. La quasi totalité des rites de passage dans diverses cultures historiques – même modernes – comportaient des séquences sexuelles, de ce genre ou autre, et touchaient inévitablement les individus que nous définissons actuellement comme ‘enfants’. Personnellement, je pense qu’il ne faut pas faire les amalgames mais plutôt bien expliquer culturellement.

    Je suis désolé, je n’ai pas trop pris le temps d’argumenter mais si vous souhaitez d’autres éléments, n’hésitez pas à me solliciter. En tous les cas, bravo pour votre publication.

    Cordialement

    (1) Lors des actes, attention aux poussées excessives en effort et durée car le plancher pelvien (comme lors des accouchements chez la femme) peut-être distendu et entraîner des conséquences physiologiques locales.
    (2) Au nombre de deux, l’un presqu’autour de l’autre, le sphincter interne est un muscle lisse, le sphincter externe est un muscle strié qui, spécialement, n’est pas fait pour ‘travailler’ longtemps. Leur fonctionnement suit un phénomène réflexe qui, au contact des matières sur les parois, incite à l’évacuation.

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