Le nom de plume
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Steve Haldeman n’est pas mon vrai nom. C’est un nom de plume.
Pour ceux qui ne connaissent rien à la réalité du monde de l’édition, ce choix peut s’apparenter à de la coquetterie d’auteur. Mais en général, le désir d’une personne qui a passé des mois, voir des années à écrire un livre, et qui y a mis beaucoup d’elle-même, c’est plutôt d’afficher son vrai patronyme. C’est une fierté personnelle, et parfois c’est une tentative de faire passer à la postérité le nom de sa famille.
En ce qui me concerne, j’ai d’abord été tenté d’être publié sous mon vrai nom. En dépit de la nature sulfureuse de mon premier roman, j’assume parfaitement mes écrits, et puis j’avais l’impression qu’en me cachant derrière un nom d’emprunt, je mentirais à ceux qui m’auraient lu. C’est une idée qui ne me plaisait pas du tout.
Mais finalement j’ai choisi d’être aussi Steve Haldeman, et ce pour plusieurs raisons.
La première tient au fait que mon premier livre narre une romance BDSM. Et comme il est écrit à la première personne, et que l’on met forcément de soi dans un roman si l’on veut que nos personnages aient du corps, il y avait un risque que l’on assimile Marc Tiery à celui qui lui a donné vie. Comme je l’ai dit, cela ne me dérangeait pas, et ça ne me dérange toujours pas. Pour preuve, en dehors de mon épouse, mon premier lecteur a été mon père. Mais il devenait plus compliqué d’imposer à ma famille d’assumer mes écrits, pas vraiment consensuels, qui pourraient générer de l’incompréhension, ou des critiques pas très objectives de la part de leur entourage.
J’imagine que les enfants des huissiers préfèrent rester discrets avec le métier de leurs parents. De la même façon, il me paraissait plus responsable de ne pas afficher au grand jour ma passion pour les romans ou un amant aime fouetter son amoureuse. Ma fille, j’en suis sûr, m’en saura gré.
J’ai donc pris un nom de plume pour protéger les gens que j’aime.
La seconde raison est liée à mon investissement en faveur de la protection de l’enfance.
Dans ce milieu, j’ai rencontré des personnes formidables, intelligentes et ouvertes d’esprit, et qui auraient été tout à fait capables de comprendre que lorsque l’on écrit un roman, on vit en quelque sorte une autre vie.
Mais, comme partout, il y a d’autres collègues dont je dirais pudiquement qu’ils ont la vue basse. Ils auraient vite fait de penser que celui qui écrit des scènes sadomasochistes ne peut être qu’un pervers malsain et dérangé, et qu’il est préférable d’éloigner les enfants de lui. Or j’adore ce que je fais, j’aime participer au bonheur des enfants que je côtoie, et je ne veux pas être poussé à arrêter.
Pour les épargner, et pour éviter de stimuler la susceptibilité de mes collègues, je n’affiche pas mon visage comme le font la plupart des auteurs, mais seulement un avatar que je trouve sympathique, et qui a été généré grâce à Toonme.
La troisième raison est plus personnelle. Comme tous les auteurs, je rêve d’être lu par des millions de lecteurs. Même si les statistiques montrent que la probabilité que j’y parvienne est faible, il existe tout de même une petite chance que cela arrive. D’autant que je suis assidu, perfectionniste, et que je fais le maximum pour faire connaître mes histoires. Or, avec le succès, vient la notoriété. Et ça, j’aime déjà moins. Je tiens beaucoup à rester anonyme. Je ne veux pas être reconnu dans la rue, et en dépit du fait que je suis quelqu’un de jovial et agréable au quotidien, je crois que ça m’agacerait très vite qu’on me demande des autographes, surtout quand je fais les courses en famille.
Comment choisir son nom de plume ?
J’avais donc choisi de prendre un pseudonyme, et quand il a fallu que j’en imagine un, je n’ai pas hésité longtemps. J’ai choisi Steve parce que c’était le prénom de mon meilleur ami, disparu trop tôt. C’était pour moi une façon de me souvenir de lui, de lui rendre hommage.
Et j’ai choisi Haldeman parce que c’est le nom de Joe Haldeman, un auteur de science-fiction dont le roman La guerre éternelle me plaît beaucoup. Je ferai d’ailleurs un article à son sujet dans les mois qui viennent.
J’ai préféré que ce pseudonyme ait du sens pour moi, mais j’aurais pu tout aussi bien m’appeler autrement. J’ai pensé un moment à prendre le prénom de mon frère, disparu trop tôt lui aussi, et j’aurais pu choisir le patronyme d’un autre écrivain que j’apprécie, il y en a tellement !
Mais en fin de compte, les options se limitaient d’elles-mêmes. Par exemple, pour le nom, je ne me voyais pas prendre n’importe lequel, au hasard. Et pour celui d’un écrivain, c’était compliqué d’en prendre un trop célèbre. Je me serais mal vu m’appeler Verne, ou Asimov. Et puis le prénom choisi ayant une consonance anglo-saxonne, il me fallait un nom en rapport.
De plus, sans avoir creusé le sujet, j’avais conscience qu’un pseudonyme doit s’accorder un minimum avec ce que l’on écrit.
En France, si Monsieur Martin Dupont écrit de l’Heroic fantasy, il va avoir plus de mal à convaincre les gens de le lire, que s’il prend le pseudonyme Steven Bradbury. Et peu importe qu’il ait du talent ou pas. Quand un lecteur potentiel français entre dans une librairie, et qu’il regarde la couverture des livres, il rêve déjà en voyant un nom d’auteur exotique, alors que ce ne sera pas le cas s’il imagine son voisin de palier.
J’avais donc choisi mon pseudonyme avec un certain soin, et c’est exactement ce qu’il faut faire, mais la réflexion sur ce sujet peut aller beaucoup plus loin. Il n’est d’ailleurs pas exclu qu’à l’avenir je doive écrire sous un autre nom, pour les raisons que je vais aborder maintenant.
Tout est marketing !
Le choix du pseudonyme est très important ! Sauf à ce que vous écriviez pour vous-même ou pour un lectorat limité, le nom de plume est l’une des premières choses que l’on verra de vous. Il doit vous représenter, mais aussi être adapté à votre cible, à ceux à qui vous espérez vendre votre livre, même si vous trouver un éditeur, et que ce n’est pas vous qui vous occupez de commercialiser votre œuvre.
En premier lieu, je dirais que c’est un nom que vous devez assumer parfaitement.
Il y a quelques années, j’avais imaginé prendre un pseudonyme à particule ou à consonance noble, parce que ça m’amusait de brouiller les pistes. Mais Henri Beaupré de Pithiviers, ou Lord Steve Haldeman, il faut pouvoir assumer. Je veux dire par là que si ça avait pu m’amuser, je m’en serais vite lassé. Et puis cela aurait donné de moi une image qui ne me correspond pas, et je pense qu’il faut être honnête avec ses lecteurs. En revanche, je suis Steve Haldeman sans équivoque. C’est un pseudonyme qui me va bien et que je ne regretterai pas, j’en suis certain. C’est un nom que j’utiliserai sans peine et c’est tant mieux, car il va falloir que je me familiarise vraiment avec. Cela peut paraître simple, mais en fin de compte, quand on vient de choisir un pseudonyme, on ne l’intègre pas immédiatement. Tous ceux avec qui vous allez communiquer vont vous appeler ainsi, or il m’arrive encore d’hésiter quand je signe un message, un post, une publication, ou même au téléphone avec un illustrateur par exemple. Et ce n’est pas qu’une question de coquetterie. J’ai choisi un pseudonyme pour protéger ma famille, donc je ne dois utiliser que lui dans mes communications d’auteur.
Si vous faites des séances de dédicaces et que vous écrivez votre vrai nom par inadvertance, ça va vite faire désordre.
Tenez compte de vos lecteurs potentiels.
À partir du moment où vous avez l’ambition d’être publié, et que vous voulez être lu, c’est que vous n’écrivez plus pour vous. Vous écrivez pour les autres.
Déjà, choisissez un nom prononçable. Vous allez l’utiliser souvent, et vous aurez à le prononcer vous-même. Si vous avez du mal, ça ne pourra que vous desservir. Et puis il faut qu’on le retienne facilement.
Il y a des modes, comme l’utilisation d’initiales. J.R.R Tolkien a été suivi par J.K Rowling, et autre George R.R. Martin. Cette façon de se faire appeler peut aussi servir à ne pas être genré d’emblée. Ne pas dire tout de suite que vous êtes un homme ou une femme peut servir votre communication. Cela donne aussi un côté mystérieux qui peut être bénéfique si vous écrivez quelque chose en rapport.
Si vous écrivez des documentaires sur la nature en danger, Steve K.P.P. Haldeman, ça dénote.
De même, n’en faites pas trop. Steve Haldeman, le 4ème du nom, fils de Georges Haldeman, c’est ridicule. Mais si vous écrivez des pamphlets, il peut être utile d’avoir un pseudonyme ouvertement caricatural ! Mais il faut que ce soit clair, qu’il n’y ait pas d’ambiguïté. Karl Zéro, par exemple, me semble avoir été un choix judicieux de la part de Marc Tellenne, compte tenu de ses activités de journaliste gonzo.
Enfin, il ne faut pas forcément rester figé dessus. Écoutez les conseils qu’on vous donne. Si vous avez la chance qu’on vous propose de chercher des lecteurs à l’international, prenez conscience que le pseudonyme que vous adorez n’y sera peut-être pas adapté. Les us et coutumes ne sont pas les mêmes partout. Votre pseudonyme peut-être déjà utilisé. Il peut être proche d’une marque qui peut vous attaquer pour parasitisme économique. Il peut également être phonétiquement proche d’un terme insultant, ou ridicule, ce qui ruinerait vos efforts de communication.
Voilà les quelques conseils que je pouvais vous donner, mais il y en a beaucoup d’autres, de la part d’autres auteurs, et de la part de professionnels du monde de l’édition.
Je vous mets en description le lien d’une vidéo Youtube de Lucie Castel, que j’ai trouvée intéressante.
Si vous voulez une version cartoonesque de vous-même, c’est par ici que ça se passe : https://toonme.com/
Episode 1 du podcast Youtube de Lucie Castel : Choisir un nom de plume : https://www.youtube.com/watch?v=-vqaWhip690
Mon livre : Ma soumise, mon amour, T1
version numérique : https://www.amazon.fr/dp/B0BDMWCYR6/
version papier : https://www.amazon.fr/dp/2494242002/