Steve Haldeman

Le bel échange, de Claudine Galéa

Vous pouvez lire l’article, ou le découvrir en version audio avec le lecteur ci-dessous. Il est également disponible en vidéo sur ma chaîne YouTube (lien dans le menu), et prochainement sur toutes les plates-formes de Podcast.

Pour en faire un résumé succinct, je dirais qu’il s’agit d’une relation de maîtresse à élève, entre une femme mûre et une autre plus jeune, dans un cadre sadomasochiste.

 

Quand on lit un roman on peut le trouver bon, ou mauvais, et parfois on ne sait pas. Du moins, il faut du temps pour qu’on se fasse une idée.

Pour ma part, ce livre fait partie de cette dernière catégorie.

 

Le bel échange commence par une petite annonce rédigée en trois lignes.

« Cherche jeune fille. Vingt ans. Brune. Bien en chair. Un mètre soixante-cinq maximum. Novice. intelligente. Pour dressage au plaisir. »

C’est une femme qui l’a publiée, d’un certain âge.

Quel âge ? Je ne me souviens plus si cette information est donnée, et ça n’a pas d’importance. Je crois me souvenir qu’aucun autre prénom n’est donné dans le livre, à part celui de Pauline, la jeune femme qui va répondre à l’annonce. Cela contribue à donner à cette histoire une ambiance particulière.

Le roman se concentre sur la façon dont la narratrice va apprendre à cette jeune femme ce que l’auteur a appelé « la règle de l’objet ». Elle va lui apprendre à « devenir le sujet de son propre désir ».

 

Ne faisons pas durer le suspense, il s’agit d’une relation sadomasochiste assez dure, qui ne s’adresse pas à ceux et celles qui veulent conserver une vision fleur bleue de la sexualité. Cela dit, il ne s’agit pas de pornographie gratuite. Les scènes ont une finalité, on n’assiste pas à un étalage de pratiques, et c’est ce qui fait la force de ces passages-là. Le désir, la sexualité et les envies sont décrits de façon objective. Il n’y a pas de place à la romance ici. Il n’y a aucun sentiment entre les deux femmes du roman, seulement l’expression de sensations, d’envies brutes, non refoulées. Elles ne sont pas amantes, il n’est pas question de sexe entre elles. La narratrice ne touche Pauline que pour lui apprendre ce que cela fait d’être frappée. Dans Le bel échange, le sexe c’est de la chaleur, de la sueur, des larmes, de la salive, du jus, des poils, de l’urine, de la merde et du sang.

Cela peut paraître assez peu engageant, mais j’ai vu de la beauté dans ces passages. Dans ce roman, on retrouve l’idée que le SM permet de vivre des sensations décuplées, des émotions non bridées par des caresses trop douces.

En dehors des moments où la narratrice s’occupe de Pauline, elle semble torturée par le souvenir d’une vie qui n’a pas toujours été heureuse.

 

Ce livre est une illustration criante de ce que j’ai déjà dit à propos des personnages masculins et de la façon dont ils sont traités par certaines autrices. Petit aparté, ces articles ayant vocation à avoir une version audio, j’utiliserai les deux termes auteure ou autrice pour être plus clair à l’oral.

Il n’y a pas vraiment d’hommes dans ce livre. Il n’y a que l’évocation d’un père malade, et la présence de caricatures d’hommes brutaux et bestiaux qui vont servir au dressage de Pauline. Ils ne sont pas décrits, ce ne sont pas vraiment des personnes, ce sont des ombres sans visage. On dirait des bêtes qui passent leur temps à baiser, crûment, violemment.

Cela signifie-t-il que l’auteure a cette vision des hommes ? Possible, mais je ne me risquerais pas à le croire. Je suis trop bien placé pour savoir que lorsque l’on écrit, on fantasme beaucoup. On explore notre humanité, on en sonde parfois les limites. On en profite pour vivre par procuration une autre vie. Dans un roman, à quoi bon parler de ce que l’on connaît déjà par cœur ?

 

L’un des points forts de cette oeuvre, c’est son style très épuré. Les phrases sont courtes, et l’action n’est pas ou peu expliquée, c’est le royaume de l’émotion brute. Du coup, le lecteur reste seul face à un texte qui peut paraître difficile à cerner de prime abord. C’est ce qui m’a marqué, et c’est la raison pour laquelle je rédige cet article à son sujet. D’ailleurs je vous invite à le lire, et à me dire en commentaire ce que vous en pensez, car je n’ai pas d’avis définitif à son sujet.

 

L’auteure est finalement assez peu connue, je n’ai pas trouvé grand-chose à son sujet. La page Wikipedia qui lui est consacrée ne permet pas de se faire un avis sur ses motivations.

En rédigeant cet article, j’en viens à me dire qu’il y a du Virginie Despentes dans ce livre. Une plume acérée, efficace, et une vision qui est intéressante, justement parce qu’elle sort de l’ordinaire.

Les rares critiques que j’ai trouvées sur ce roman ne sont pas très positives. Et les interprétations qui sont faites de l’ouvrage ne m’ont pas convaincu. J’ai la sensation que ceux qui ont rédigé les articles que j’ai lus sont restés un peu perdus, comme moi, mais qu’ils se sont forcés à donner un avis malgré tout.

L’auteure n’a pas donné beaucoup d’explications sur cette oeuvre, il n’y a pas de préface. La seule chose qui est indiquée à la fin de l’édition que je possède, c’est qu’une partie de ce texte est issue d’une commande de France Culture.

En conséquence Claudine Galéa nous a laissé une grande liberté d’interprétation, la possibilité de prendre possession de son récit, de nous l’approprier et de le juger en fonction de nos propres aspirations, de notre sensibilité. Suivant votre ouverture d’esprit, vous y trouverez quelque chose de beau, ou pas. En tous les cas, j’apprécie la liberté d’expression de l’auteur. C’est quelque chose qui m’est cher, qui a guidé mon propre parcours d’écrivain, et qui m’a mené à accoucher de Ma soumise, mon amour.

 

Page Wikipedia de l’auteure : https://fr.wikipedia.org/wiki/Claudine_Galea

 

Mon livre : Ma soumise, mon amour, T1

version numérique : https://www.amazon.fr/dp/B0BDMWCYR6/

version papier : https://www.amazon.fr/dp/2494242002/

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